Bernard Quiriny - Les Assoiffées



Mince, alors ! On avait vraiment adoré les deux premiers ouvrages de Bernard Quiriny, deux recueils de nouvelles qu'on évoque furtivement ici. On serait tenté de dire que Les Assoiffées nous ont laissé sur notre soif. Non que ce soit un mauvais livre, loin de là, mais on attendait autre chose, voilà tout. On se demande même quelle serait la réaction de l'exigeant critique qu'est Quiriny face à ce roman...
Toujours est-il qu'il s'agit d'une uchronie, genre qui nous est cher - et sur lequel Emmanuel Carrère publia naguère un agréable petit bouquin. Ici, l'uchronie repose sur une supposée révolution des années 70 qui aurait conduit le Benelux à devenir un pays encore plus fermé que la Corée du Nord - le régime, lui, serait une dictature féministe où les hommes, réduits à l'état d'esclave dans le meilleur des cas, seraient peu à peu appelés à disparaître. L'idée, on le confesse, nous a réjoui. Le livre expose en parallèle le journal d'une Beneluxienne dont le destin va se trouver soudain propulsée dans les hautes sphères d'un pouvoir aussi corrompu que délirant (la partie la plus réussie), et le récit du voyage (une première) de quelques intellectuels français dans le pays. Étrangement, les deux histoires ne se mélangent pas.
Franchement, ça se lit tout seul, et Quiriny mène son histoire avec talent, gérant parfaitement la montée en puissance de l'intrigue. Il y a des passages assez drôles, quelques piques et allusions amusantes, une foule de détails bien vus. Mais pourquoi, en fermant le livre, cette impression de frustration, ce sentiment que le roman n'est pas complètement réussi ? C'est sans doute la gestion des six visiteurs du Benelux. On n'y croit pas trop. Ils sont caricaturaux, dans le mauvais sens du terme. L'erreur de Quiriny, à notre sens, est d'avoir choisi de multiplier les points de vue narratifs, plutôt que de s'en tenir à un seul narrateur - comme c'est le cas pour le journal de la Beneluxienne.
Toutefois, malgré nos légères réserves, Les Assoiffés restent tout à fait recommandables.

Commentaires

  1. Je suis d'accord. Cela aurait été mieux que l'auteur se concentre sur l'histoire d'une seule personne, à savoir la "Beneluxienne". Le retour en France des visiteurs est un peu bâclé à mon goût, ainsi que l'épilogue. Mais ce livre reste intéressant.
    Une description de la Belgique qui fait froid dans le dos...

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  2. J'espère que je n'ai pas été trop négatif - j'ai dévoré le roman. Mais j'ai été un peu déçu, c'est tout. En tout cas, le livre intéresse : ce sont des centaines de lecteurs qui sont venus sur cette page, via Google...

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  3. Ça ne m'étonne pas que les gens s'intéressent à ce livre. L'idée d'un régime féministe et totalitaire en Belgique est original. D'habitude, les histoires se passent toujours dans des pays plus "importants".
    Personnellement, j'ai été séduite par le fait que le récit se déroulait en Belgique, et c'est très certainement pour cette raison que j'ai acheté le livre.

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  4. Et visiblement, le livre marche plutôt bien :
    http://www.lexpress.fr/culture/livre/le-bapteme-du-feu-des-nouveaux-romanciers_927753.html

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